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Claude Lebrun, le Président Thomas vous a chargé d'une mission dans certains dépôts d'archives parisiens. Pouvez-vous nous en parler ?

C'est vrai que, en dehors de mes attributions concernant le fichier des lignes agnatiques - et parfois cognatiques -, Yves Thomas m'a demandé de bien vouloir mettre en place des équipes qui assureraient les dépouillements et relevés suivants :

- Aux Archives de Paris, le dépouillement de registres de décès détenus par l'administration fiscale, dite série DQ8, et ceci de 1790 à 1860.

- Aux Archives de Paris, le relevé de registres de B.M.S. (baptêmes, mariages, sépultures) pour soixante-trois paroisses qui n'ont pas encore été répertoriées. Nous en établissons les listes qui seront classées alphabétiquement.

- Aux Archives Nationales, et plus particulèrement au Minutier Central, le relevé d'un certain nombre d'actes à partir des répertoires des 117 études notariales existant jusqu'en 1790.

- Aux Archives de l'Archevêché, le dépouillement (baptêmes, mariage et sépultures) après numérisation d'un grand nombre d'épaves concernant des paroisses, oratoires, hôpitaux, etc., non inventoriés aux Archives de Paris et retrouvées depuis peu.


- Au CEGF, l'exploitation de tous les patronymes, extraits des lignes agnatiques, d'individus nés, mariés ou décédés à Paris, avec de plus amples précisions. Y sont joints les patronymes - des dizaines de milliers - fournis par les correspondants d'autres associations et faisant référence à des Parisiens mariés, cités dans un acte notarié ou décédés dans un autre département, outre-mer ou à l'étranger.


- Enfin, au CEGF, le relevé de tous les patronymes ayant donné lieu à des recherches sur Paris et en région parisienne et pour lesquels nos adhérents nous ont sollicité (voir notre revue).


En quoi ce travail va-t-il servir aux généalogistes ? N'avait-il jamais été effectué auparavant, ne serait-ce qu'en partie ?

Non. Seule l'étude dite "des TRA" (patronymes commençant par ces trois lettres) avait été réalisée par le professeur Dupâquier.

En ce qui concerne les Archives de Paris, notre intention est d'aider à reconstituer l'état civil parisien entièrement détruit par divers incendies lors de l'insurrection de la Commune, en 1871. C'est un véritable travail de généalogie, qui sera classé alphabétiquement et mis à la disposition des chercheurs, entre autres sur une base de données Internet. Elle sera monumentale.

N'est-ce pas un peu présomptueux de dire cela ?

Savez-vous que cela représente le dépouillement (je dirais même le "décryptage") d'environ 1,8 million d'actes de décès, dont 340.000 pour la seule période révolutionnaire ? Et le fait que ces registres aient été dressés par l'administration fiscale, à l'affût du moindre bien, nous apporte une multitude de précisions de tous ordres.

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Avez-vous quelques exemples à nous donner ?

En ce qui concerne l'état civil, nous répertorions le patronyme, le ou les prénoms, la filiation (fils, époux en premières noces, veuf en deuxièmes noces, etc.), les professions exercées, l'adresse, la date de décès, l'âge, s'il y a des enfants, l'énoncé des biens (s'il y en a), l'état des inventaires, l'existence de contrats de mariage, l'énoncé des témoins avec leur profession, leur parenté, leur adresse et (éventuellement) leur lieu d'origine. Sans compter avec des commentaires inattendus de la part du greffier.

Effectivement c'est impressionnant, dans la mesure où chacune de ces données pourra être le point de départ de nouvelles recherches. Vous évoquiez des commentaires inattendus ?

On apprend, par exemple, que les héritiers de tel cocher n'auront pas à se disputer pour sa succession, car le pauvre bougre ne possède qu'une triste paillasse et le greffier ajoute qu'il vit dans la misère la plus noire.


Ce genre d'exemple n'est-il pas exceptionnel ?

Absolument pas. On y apprend aussi que, l'administration fiscale recherchant les parents d'un nourrisson venant de décéder, la réponse du voisinage fut, je cite : «cet enfant doit être de [telle] femme , car elle couche avec tout le monde».

Les greffiers allaient jusqu'à s'impliquer personnellement. Outre le fait de supprimer le nom des saints dans le libellé des adresses, il leur arrivait de donner leur appréciation sur le nom de la rue. Par exemple : rue Culture Sainte Catherine est devenue «rue Catherine, culture sûrement pas».

Outre l'aspect social, on y croise l'Histoire à toutes les pages, des réfugiés de Saint Dominique (Saint Domingue) à des listes entières de guillotinés, en passant par le retour des blessés des campagnes de la République.

Je terminerai en disant que, en quelques mois, nous avons répertorié 35.000 décès, ce qui représente près de 90.000 entrées.



* Réponse à l'exercice de déchiffrage : Saint-Yves Henriette Catherine Victorine

A suivre ...